Bonjour, je m’appelle Cédric et je suis un alcoolique. Enfin, pas vraiment… en fait pas du tout. Mais pour une raison qui m’échappe ma belle-mère est persuadée que je le suis, et quoi que je dise ou fasse elle ne changera pas d’avis. Quand elle nous rend visite il y a deux scénarios possibles : soit le casier à vin contient des bouteilles et elle s’écrie « Oh mon Dieu ! Tu vas boire tout çà ! » – soit le casier est vide et elle dit « Oh mon Dieu ! Tu as tout bu ! » Dans les deux cas la conclusion est la même : je dois être un alcoolique. Peu importe que je ne me sois jamais vraiment intéressé au vin, et que je boive rarement plus d’un verre à la fois. La consommation de vin de Mai est plus grande que la mienne en dépit de sons poids plume et de ses gènes asiatiques, mais personne ne veut le croire.
L’ironie ultime est que mon accusatrice, la mère de Mai, prépare de l’alcool de riz « maison » avec une teneur en alcool suffisante pour désinfecter n’importe quelle plaie. La dernière fois qu’elle nous a fait cadeau d’une bouteille (nous avons bien essayé de refuser mais elle n’a accepté aucune excuse) nous avons ainsi décidé qu’il serait plus approprié de la ranger dans l’armoire à pharmacie. La gnôle vietnamienne y est restée jusqu’à ce que je lui trouve une autre fonction : mélangée à l’essence dans le réservoir de la voiture, la mixture améliore la performance du moteur, un peu comme la nitroglycérine.
La famille est réunie pour Thanksgiving. Sur la table : une énorme dinde farcie et une bouteille de vin, que l’on me demande d’ouvrir car on me considère comme un expert dans ce domaine. Mai demande : « Maman, penses-tu que Cédric est un alcoolique ? » Elle répond avec un sourire tendre : « Oui, mais ce n’est pas de sa faute : il est Français ! »
Cédric, 2 Novembre 2011
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