Je m’envole de Paris vers San Francisco. À 24 ans c’est ma première « véritable » expérience de voyage aérien. Mes déplacements d’affaires à Barcelone et Düsseldorf ne comptent pas : la boisson et les cacahuètes sont à peine avalées que l’équipage amorce déjà les préparatifs d’atterrissage. Aujourd’hui c’est pour de vrai : dix à onze heures dans un Boeing 747, avion légendaire. François, mon complice pour ce périple de 10 jours sur la côte Ouest des Etats-Unis, est assis à la rangée voisine, ses genoux touchant quasiment son front – le prix à payer pour être un grand gaillard qui voyage en classe Touriste. Bientôt il dort a poings fermés alors que je regarde film après film, incapable de fermer les yeux. Avec le surmenage et le stress de ces derniers temps je suis vraiment épuisé, je devrais profiter de cette occasion de me reposer… mais la volonté de dormir n’est malheureusement pas suffisante. Je n’arrive pas à débrancher mon cerveau, je suis bien trop excité. Une pointe de culpabilité pour avoir laissé à François toute la préparation du voyage, un tourbillon de questions sur cet itinéraire que je n’arrive pas à mémoriser… je m’empare du Guide du Routard et commence à m’informer sur les endroits que nous allons visiter. Il fait chaud et moite dans cet avion… je me penche pour augmenter la ventilation. Mais quelle chaleur!
La lumière m’aveugle, des visages de déplacent. L’un d’entre eux demande « Est-ce que ça va ? ». Je voudrais dire « Oui » mais ma bouche est couverte par… un masque à oxygène !? Comme le brouillard se dissipe je découvre lentement mes alentours : je suis allongé sur le sol dans la zone qui sert de cuisine, avec plusieurs hôtesses et stewards qui me tiennent à l’œil. Mon cerveau recouvre progressivement toutes ses fonctions, y compris la mémoire : un vague souvenir de m’être senti mal, d’avoir attrapé le sac en papier… après c’est tout noir.
À moitié ivre d’oxygène, je suis bientôt capable de me lever et de retourner avec les autres passagers. Bien que le vol soit quasiment complet l’équipage a libéré une rangée entière pour s’assurer que je puisse m’allonger… ou bien pour s’assurer que je ne vomisse sur personne – peu importe ! On m’explique que l’altitude de 3.000m a un impact sur le métabolisme en dépit de la pressurisation de la cabine : si je ne veux pas m’évanouir de nouveau il vaut mieux éviter l’alcool et choisir des boissons avec de la caféine. Alors je suis sensé refuser le champagne gratuit et demander un Coca à la place ? Pas drôle…
À l’arrivée à San Francisco je retrouve François, rafraîchi après une nuit reposante dans ma rangée de sièges à moi tout seul, même si je n’ai pas dormi (un effet secondaire des boissons caféinées). « Comment vas-tu ? » demande t-il. Je souris en coin et réplique : « Bien. J’ai entendu dire que quelqu’un a eu un malaise pendant le vol, est-ce que tu as vu quelque chose ? » « Vraiment ? » dit François, « Je ne sais pas, j’ai roupillé du début à la fin. »
Cédric, 21/08/2011
(Vol en Août 1999)
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